UA: On est impatient de voir Kagame à l’œuvre

Désormais au pied du mur, la question que l’on pourrait se poser est de savoir dans quel sens le successeur d’Alpha Condé construira l’édifice UA dont il a désormais la charge.  En effet, l’on est impatient de voir Kagame à l’œuvre. L’on est impatient de voir comment celui qui gère son pays d’une main de fer au point d’être perçu comme une référence en matière de gestion en Afrique, mènera le navire de ses pairs, et surtout quelle marque il imprimera à la marche de cette institution qui peine véritablement à s’affirmer sur un continent en pleine mutation démocratique et en proie à la mal gouvernance, aux défis sécuritaires ainsi qu’aux nombreux foyers de tension qui sont le lot quotidien de ses habitants. Sur la question de l’autofinancement de l’institution par le prélèvement de la taxe de 0,2%, Paul Kagame est particulièrement attendu sur la façon dont il pourra amener les uns et les autres à respecter leurs engagements par le paiement effectif et à bonne date de cette contribution. En tout cas, si les débuts sont encourageants, au regard de la vingtaine de pays qui ont déjà adopté cette mesure et de la dizaine qui s’apprêtent à emboîter le pas aux premiers, il n’en demeure pas moins que le chemin pour parvenir à l’adhésion pleine et entière de tous, reste encore parsemé d’embuches. Car, les divergences ne manquent pas, quant à la mise en œuvre de ce prélèvement qui semble aller contre les intérêts de certains pays comme l’Egypte, l’Afrique du sud voire le Nigeria, qui ont des économies particulièrement tournées vers l’extérieur, notamment l’Europe dont ils sont les principaux partenaires commerciaux. En tout état de cause, si l’on peut avoir la faiblesse de croire que Paul Kagame  réussira les réformes économiques allant dans le sens de l’autonomisation financière de l’institution qui dépend encore fortement des fonds extérieurs pour son fonctionnement, l’on pourrait tout de même émettre des doutes sur sa capacité à contribuer au renforcement de la démocratie sur un continent où bien des dictateurs font dans le résistance dans le jeu de l’alternance. Du reste, l’homme a une conception bien à lui de la démocratie, qui ne s’accommode pas forcément avec la conception universelle que l’on pourrait en avoir en termes de respect du jeu de l’alternance. La démocratie tropicalisée à laquelle il semble appeler, n’est en réalité qu’une forme de dictature déguisée dans laquelle le despote se donne les moyens de sa politique en ayant les coudées franches pour agir sans véritable voix de l’opposition à son action.

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On ne voit pas Paul Kagame faire la leçon à un Joseph Kabila

Dans ces conditions,  l’on ne voit pas comment il pourrait remonter les bretelles aux satrapes du continent qui n’hésitent pas à tripatouiller les textes fondamentaux de leur pays à l’effet de se maintenir au pouvoir, quand lui-même s’est ouvert un boulevard pour rester au pouvoir jusqu’en 2034. Dans ce même ordre d’idée, l’appel du président de la Commission de l’UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, à une mise en œuvre urgente « de bonne foi de l’Accord de la Saint-Sylvestre en vue de la tenue des élections de décembre 2018 » en République démocratique du Congo, sonne comme un vœu pieux si ce n’est un aveu d’impuissance, l’institution panafricaine n’ayant pratiquement aucun moyen de pression encore moins de coercition pour contraindre Joseph Kabila à s’exécuter. C’est donc un peu comme le chien qui aboie et la caravane passe. Et l’on ne voit pas Paul Kagame faire la leçon à un Joseph Kabila, tous deux étant sur ce plan, des caïmans d’un même marigot. Il y a donc lieu de croire que la question de l’alternance et du renforcement de la démocratie en Afrique risquent d’être le Talon d’Achille du règne de l’homme fort de Kigali à la tête de l’institution panafricaine. Pas sûr donc que cette UA-là puisse rompre de sitôt avec l’image de syndicat de chefs d’Etat qui lui colle à la peau, malgré les dénégations du président sortant, le Guinéen Alpha Condé.

Comment peut-il du reste en être autrement, quand on voit la manière dont le président équato-guinéen, Teodoro Obiang, a volé au secours de son ami déchu, le Gambien Yahya Jammeh à qui il a offert toute sa protection contre d’éventuelles poursuites, au prétexte  « que c’est une garantie pour que les autres chefs d’Etat qui doivent quitter le pouvoir n’aient pas peur des harcèlements qu’ils pourraient subir par après »? Assurément, avec cette race de chefs d’Etat, l’Afrique a encore du chemin à parcourir.

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 « Le Pays »

Moussa Diawara
Journaliste reporter d'images, administrateur Gl à reporterguinee.net Aime le voyage, la lecture, la découverte et le sport